L’écriture numérique en FLE

30 janvier 2012 par Philippe Mijon Laisser une réponse »

Comme le soulignent R. Bouchard et L. Kadi dans leur présentation du dernier numéro de Recherches et Applications (nº 51, janvier 2012, « Didactiques de l’écrit et nouvelles pratiques d’écriture »), « les publications sur l’enseignement de l’écrit sont relativement rares ». Ils ont d’ailleurs raison de rappeler que « la méthodologie, sinon la didactique, des langues vivantes a pris son autonomie en mettant en avant l’oral comme objet d’apprentissage prioritaire ». Et pourtant, ce numéro de R&A montre bien à quel point, en dépit des antiennes sur la disparition progressive de l’écrit, celui-ci est plus vivant que jamais, certes sous de nouvelles formes, c’est-à-dire, notamment, sous celle de « l’écrit numérique ».

Les étudiants FLE (du moins dans mes cours en entreprises) ont une demande répétée: pouvoir être capables d’échanger des mails en français. Je dois avouer qu’aborder un tel apprentissage me pose souvent des problèmes : quelles sont les caractéristiques de cette écriture ? Comment les transmettre ? Faute d’avoir les idées claires sur la question, je navigue, comme bien souvent, à coups d’empirisme. Eh bien, dans le dernier numéro de R&A, j’ai trouvé quelques pistes intéressantes qui vont m’aider un peu.

Les mails relèvent de ce que G. Vigner (R&A, nº51, « Écrire en FLE : quel enseignement pour quel apprentissage ? ») appelle « les écrits d’interaction » (qu’il distingue des « écrits d’accompagnement » –pour prendre des notes par exemple- et « des écrits de production » –comme pour rédiger un dossier). Ces écrits mobilisent la capacité à interagir et celle à gérer des tours de paroles ; ils visent à l’expression de soi et font directement référence à une énonciation antérieure. On voit immédiatement que l’écriture numérique présente de nombreux points communs avec l’oral. C’est tout le propos de M. Marcoccia, qui, dans son article (« Conversationnalisation et contextualisation : deux phénomènes pour décrire l’écriture numérique »), a le mérite de montrer les particularités de l’écriture numérique.

Selon lui, « de nombreuses caractéristiques de l’écriture numérique en situation d’échange relèvent de la conversationnalisation dans la mesure où elles contribuent à l’importation du registre et des spécificités de la conversation ordinaire en face à face dans un autre type d’échange discursif ». De même, il souligne l’importance des procédés de contextualisation, « c’est-à-dire des activités par lesquelles les internautes rendent accessibles et pertinents divers aspects du contexte d’énonciation (normalement inaccessible en situation de communication en ligne), pour permettre l’interprétation de leur message ».

Le courrier électronique est un écrit numérique asynchrone (c’est-à-dire différé, en opposition avec les écrits numériques synchrones, qui permettent l’échange en direct ou quasi direct, comme la messagerie instantanée). M. Marcoccia souligne que ceux-ci sont « généralement plus formels et plus proches de l’écrit standard que les écrits numériques synchrones, […] « parce que les scripteurs ont conscience de leur archivage et de leur pérennisation par le système ». On voit donc que l’écriture numérique ne correspond pas simplement à l’adoption d’un style oral mais qu’elle constitue en quelque sorte un « entre-deux » –entre écrit et oral– ou même semble les dépasser (selon M. Marcoccia, elle serait « au-delà de l’opposition écrit-oral »).

Enfin, il dresse une liste des caractéristiques de ces écrits numériques :

–       l’usage prédominant du présent

–       la fréquence plus importante qu’à l’oral et qu’à l’écrit de pronoms de première personne

–       l’importance de l’utilisation des verbes modaux

–       les procédés de simplification d’écriture (comme les abréviations)

–       l’écriture phonétique

Tout cela me sera très profitable pour mes prochains cours !!

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